mardi 15 mars 2011

Ma vie après votre mort


Dans la vie, on fait parfois des rencontres et on se lie d'amitié avec des gens dont on aurait pas soupçonné la profession. C'est le cas avec Lens, l'auteur de cet ouvrage, un pote dont j'apprécie la discussion, autant que son levé de coude et son amour des belles choses (dans tous les sens du terme). Non content de cela, Lens a deux particularités supplémentaires:
- l'une ancienne, il a été croque-mort
- l'une récente, c'est un auteur publié, d'abord dans le magazine satirique "psykopate", désormais dans un recueil de ces nouvelles toutes vécues.

Je vous laisse juger de la prose de ses deux nouvelles (la deuxième paraîtra dans un prochains billet). Si vous aimez, le livre se retrouvera dans toutes les bonnes librairies début avril.
Moi perso je suis mort de rire à chaque fois que j'en lis une... haaa... monde cruel:

Les différents rôles dans le milieu funéraire sont définis selon l'expérience et le physique de chaque employé, étant donné qu'une cérémonie se déroule comme suit.
Les porteurs et le maître de cérémonie (également chauffeur) arrivent sur les lieux, habituellement un funérarium ou un hôpital. Ils organisent les diverses paperasses ; quand elle n'a pas été faite, ils effectuent ce que l'on appelle la mise en bière. Après avoir présenté à la famille son défunt, ils viennent à la fin du recueillement procéder à la fermeture du cercueil. Puis ils conduisent le défunt et sa famille au lieu de culte, s'il en a été défini un ; dans le cas contraire, ils se rendent directement au cimetière. Là, un dernier adieu est proposé à la famille autour de la sépulture, avant que l'équipe d'agents funéraires ne pratique l'inhumation. C'est seulement après cela que les marbriers scellent la dalle, ou rebouchent le trou. Pendant ce temps là, le maitre de cérémonie annonce la fin des obsèques, remet le registre de condoléances ainsi que tous les papiers nécessaires au représentant de la famille. Finalement, tout le monde regagne ses pénates, le cœur gros ou léger.
En tant que croque-mort, plusieurs habilitations nous sont proposées, bien que nous puissions cumuler les postes suivants.
Premièrement, celui de porteur de cercueil, qui pratique la mise en bière, porte le cercueil, inhume, et assiste le maitre de cérémonie.
Deuxièmement, celui de maître de cérémonie. Il est le lien entre la famille, les porteurs, et les marbriers. Il est le porte parole de sa maison de pompes funèbres, et prend en note les recommandations des familles, ainsi que celles de son équipe. Il prend la parole devant toute l'assistance pour donner à toute la famille, et aux amis de celle-ci, les diverses marches à suivre.
Troisièmement, les marbriers s'occupent de la maintenance des monuments funéraires. Ils creusent la terre, ou descellent une plaque de marbre afin que les agents funéraires puissent pratiquer l'inhumation.
Quoi qu'il en soit, les réquisitions peuvent être exécutées par n'importe qui, du moment qu'il ait le cœur bien accroché.
Mon premier jour commença par une réquisition. Drôle de nom, car avant ce jour, cela n'existait pour moi qu'au cinéma. J'imaginais un inspecteur new-yorkais, ou autre, se pointant un jour devant ma voiture en hurlant : « POLICE! JE REQUISITIONNE CE VEHICULE ! ». Eh bien non, pas du tout ! Les réquisitions ne se limitent pas à ça. Elles peuvent tout aussi bien consister à aller sur des lieux d'accidents dans le but de récupérer le cadavre de quelqu'un, mort loin de tout hôpital, ou maison de retraite. Puis prendre le corps tel quel ou le rassembler, cela dépend des cas. Ensuite l'emmener à l'IML - soit l'institutmedico-légal du coin, pour autopsie et autres examens d'identifications. Le plus délicat dans ce genre de cas est justement de ne pas être trop sensible, surtout si c'est votre premier jour.
Lorsque je pénétrai avec le légiste dans les lieux de ma toute première réquisition, une légère odeur de noisette me vint aux narines. Une femme désespérée, entourée de policiers, pleurait toutes les larmes de son corps. Et là, sur le tapis persan du salon, gisait mon premier « client ». J'eus du mal à m'en approcher. Mais, après un court moment d'observation, et quelques réserves de courage distillées dans ma lâcheté, je m'avançai vers le corps, tentant de reconstituer instinctivement les faits.
Comment un homme d'une quarantaine d'années avait-il bien pu s'électrocuter avec un interrupteur ? Il reposait sur le ventre, la tête tournée sur le côté, dans un angle qui aurait fait rougir des mathématiciens. En m'approchant, je m'aperçus que ce que je prenais pour de la purée de choux-fleurs était en réalité la cervelle du « client ». Le légiste, qui m'attendait penché sur la victime, me murmura : « Il est cuit à point ». Relevant la tête, je captai la conversation qui se tenait dans la cuisine adjacente, et je reconstituai la scène malgré moi.
Monsieur Séguran avait voulu démonter l'interrupteur, qui fonctionnait mal. S'abstenant de couper le disjoncteur car il était soucieux de suivre le match en cours à la télévision, il s'était efforcé de dévisser ledit interrupteur avec un tournevis. C'est par une infortune caractérisée qu'il s'est envoyé de l'index au cerveau 220 volts, et ce pendant près d'une demi-heure. L'entendant pousser d'effroyables hurlements, sa tendre épouse, en proie à la panique, chercha le disjoncteur dans toute la maison. Quand elle le trouva enfin dans une penderie, derrière un ramassis de manteaux et de vestes élimées, elle coupa immédiatement le courant. N'étant plus prisonnier de la fée électricité, Monsieur Séguran tomba en arrière, se retournant dans sa chute, et heurtant à la volée une chaise, qui lui pulvérisa la fontanelle, répandant toutes les idées qu'il aurait pu avoir sur le tapis du salon.
Ma première tâche fut de recueillir la matière grise de Monsieur Séguran, répandue en une coulée poisseuse sur le tapis. Et, bien que l'infernale odeur de noisette rance ne quittait pas mes narines, je raclai et ramassai les neurones de Monsieur Séguran, en me disant qu'après ça, je serais rôdé.
Ce fut au moment de mon premier haut-le-cœur que Madame Séguran,
accompagnée de deux policiers, s'invita au dessus de la dépouille de son époux. « Pourriez vous nettoyer mon tapis correctement, jeune homme ? Il a une valeur sentimentale, à présent. Je ne désire pas que le dernier souvenir que mon mari me laisse soit une tache douteuse sur mon tapis persan. »
Elle ne pleurait plus ; tant bien que mal, je m'exécutai en me serinant que c'était mon premier jour, que je ne devais pas la ramener, qu'il serait malvenu de rembarrer une néo-veuve de deux heures. Je m'empêchai de vomir en frottant, alors que Monsieur Séguran partait sur une civière dans une ambulance silencieuse. Je m'acharnais avec férocité sur la tache, quand mon légiste vint me délivrer, me soufflant comme une vérité universelle : « Tu veux faire carrière dans le pressing? Laisse ça, ils se débrouilleront. On nous attend. »
J'ai su quelques mois plus tard que Monsieur Séguran avait bel et bien coupé le courant avant de s'adonner au bricolage, et que Madame avait rebranché le disjoncteur, pendant que son mari réparait l'interrupteur. Après l'avoir littéralement laissé cuire, elle avait joué la scène de la femme éplorée et stupide, qui ne trouve pas le disjoncteur, en courant partout et hurlant pour donner le change à ses voisins. La police avait découvert qu'il n'y avait pas de match programmé à l'heure de ''l'accident''. Madame Séguran purge à présent une peine d'une dizaine d'années dans une prison française.
par Lens O'Driscoll

Vous pourrez trouver le livre sur : http://www.edkiro.fr/ma-vie-apres-votre-mort.html

7 commentaires:

  1. Sympa mais pleins de fautes.
    A lire en soirée, devant un bon feu de cheminée avec une bonne mousse......

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  2. Je décline toute responsabilité sur les fautes repérer dans le texte cité
    Pour la prochaine nouvelle elle devrait arrivé dans deux jour

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  3. ça me ferait mal pour ce qui est des fautes, après quatres passages aux corrections, faut vraiment les trouver, et je demande à voir...

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  4. Les quelques fautes qu'il y avait étaient dans le petit paragraphe introductif, édité depuis, pas dans le texte de la nouvelle. :)

    Crapoto, éditeur fou.

    PS: quatre, sans "s" ;)

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  5. quand je dis que j'ai besoin d'une armée de correcteurs...
    c'est pas des paroles en l'air!

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